Archives mensuelles : avril 2011

Pas de jupes à bord ! officier féminin de la Marine, 1973-2000

Parution du livre le 12 avril 2011 – C. Bertrand relate son combat pour faire évoluer les mentalités d’une institution peu féminisée. Au cours de 28 ans de carrière, alors qu’elles ne sont que 12 femmes à partager ce statut, le règlement des officiers féminins ne lui a jamais permis d’embarquer.

A 12 ans, des rêves plein la tête, Catherine Bertrand-Gannerie se décide : elle entrera dans la marine. La mer, l’uniforme, le prestige et l’action… Après des études littéraires, elle pousse enfin la porte étroite mais suffisante pour intégrer la marine. Elle gravit la hiérarchie des officiers féminins jusqu’aux « cinq panachés ». Elle fait partie de cette génération d’officiers privés de poser leur sac à bord des bâtiments de la marine. Ce qui ne l’empêche pas, de Brest à Carpiquet, de Paris à Lann-Bihoué, de lutter au quotidien pour faire évoluer le statut des personnels féminins, de pourfendre la misogynie qui règne dans ce bastion masculin, de se battre pour obtenir les appellations réglementaires et le port du sabre. En tricorne et boutons dorés, elle raconte librement vingt-huit ans de carrière, avouant ses faux pas, ses lacunes, ses déceptions, évoquant la solitude et les conflits relationnels. Elle dit aussi ses enthousiasmes, ses passions et ses joies. Mais la fierté de ses 14 Juillet sur les pavés parisiens ou la griserie des sorties occasionnelles en mer ne cachent pas l’amertume de n’avoir pu servir à bord, ni le désenchantement d’être passée à côté du rêve.

Catherine BERTRAND-GANNERIE, a mené une carrière de vingt-huit ans dans le corps des officiers féminins de la Marine nationale. Diplômée en lettres et en histoire, elle a présenté un mémoire de maîtrise sur la vie quotidienne des femmes militaires pendant la Seconde Guerre mondiale.

Extrait du livre :

juin 2000

La Marine, j’en ai toujours rêvé.

Alors, quand une brèche fendilla ce monde clos, je m’y engouffrai avec enthousiasme.

Dans le couloir d’internat où la Marine tenait parqués ses élèves officiers et officiers mariniers féminins, une silhouette se dressa :

– Attention ! Fille de civils… Dans la Marine, on ne confond pas les torchons et les serviettes !

– Mais qui sont les torchons ? Et qui, les serviettes ? demandai-je avec naïveté.

Outrée, la silhouette galonnée s’éloigna.

Je compris que je le découvrirais toute seule.

Je rencontrai des torchons, damassés comme des nappes de mariage. Et des serviettes, modestes comme des torchons. Comment savoir ? Je sentis qu’il faudrait naviguer à l’estime. Et aussi se battre pour obtenir le respect, l’égalité, l’embarquement, le port du sabre, l’appellation par le grade et non cet égrillard «Madame ou mademoiselle ?» ou encore l’emploi à sens unique du prénom ; ou, cavalier – «Au nom de l’égalité, c’est ce que vous voulez, non ?» – du patronyme. Et encore, refuser le paternalisme, le machisme, les privautés et la mise à l’épreuve.

Un jour, la porte s’ouvrit enfin, si brutalement que je la reçus en pleine figure : on embarquait les jeunes générations.

Moi, je restais sur le quai ; à défaut de partir sur la mer, j’avais choisi d’être mère.

Mais je naviguai quand même, en escarpins sur une corde raide, boitant sur une formation jamais complètement acquise, me mesurant dans des combats quotidiens à ceux que les armées reconnaissaient comme leurs depuis toujours, évitant les peaux de banane et les humiliations.

Heureusement, il y avait les serviettes, celles qui encouragent, qui font confiance, qui soufflent la bonne réponse, qui font à votre place, discrètement, quand on ne sait pas.

Dernièrement sur le port, les mains au fond des poches, j’ai croisé une silhouette familière entre toutes, ma cadette de trente ans. Elle regardait, vers le large, le rêve aux voiles fanées qui disparaissait dans la brume. Elle me tendit un parchemin humide, mangé par le sel. J’y lus : «Aurais pu mieux faire.»

Auteur : Catherine Bertrand-Gannerie

Catherine Bertrand-Gannerie

Éditeur : Ouest-France, Rennes

Nicole Mangin – Une Lorraine au cœur de la Grande Guerre – L’unique femme médecin de l’armée française (1914-1918)

Parution du livre le 7 avril 2011 – Originaire de la Meuse, Nicole Mangin (1878-1919) est admise – malgré la misogynie de l’époque – à la faculté de médecine à Paris.

Tout en se consacrant aux soins des malades dans divers services hospitaliers, elle se livre à des recherches dans les domaines de la tuberculose et du cancer. Mais Nicole Mangin est surtout une femme en avance sur la mentalité de son temps et qui rejoint les idées du féminisme par sa volonté de s’imposer dans un métier particulièrement fermé aux femmes : la médecine. C’est la Première Guerre mondiale qui lui donnera sa chance et qui la projettera au premier plan, à Verdun, où elle servira dans divers hôpitaux du front et où elle pratiquera la chirurgie sur les soldats français ayant subi les assauts et bombardements allemands.

C’est aussi le fonctionnement du Service de santé de l’armée française qui est décrit par l’auteur au cours de ces mois vécus par Nicole Mangin dans l’enfer de Verdun. En octobre 1916, le Commandement lui confie la direction de l’hôpital-école Édith-Cavell pour infirmières à Paris et la nomme médecin-capitaine. Elle y travaillera sans relâche jusqu’en mai 1919, traitant les malades de la grippe espagnole.

Démobilisée à l’issue de la guerre, elle décède le 6 juin 1919, à 41 ans, après avoir absorbé une dose létale de médicaments.

Biographie de l’auteur  en 2011 …

Jean-Jacques Schneider est médecin généraliste.

Ses passions se partagent entre la médecine, les sciences et l’étude de la Grande Guerre. Moins que l’écoulement de ses événements historiques, ce sont les mutations de la société française et certains faits volontairement occultés ou tombés dans l’oubli – du fait de la modestie de leurs auteurs ou de leurs proches – qui retiennent son attention. Il est l’auteur de l’ouvrage « Le Service de santé de l’armée française » à Verdun en 1916 (Serpenoise, 2008).